Un homme bien triste.

Stormwind, en soirée:

"Il y a bien longtemps que ma vie n'est plus ce qu'elle était. Bien longtemps que je n'ai pu éprouver cette joie qui emplissait mon coeur. Il ya bien longtemps que je ne les ai plus revus...Leur est-ils arrivés quelque chose ?"

Le ciel était encore pluvieux sur la capitale des Hommes, et la pluie battante tombait drûe. L'eau ruisselait entre les pavés et sur les toitures de bois et d'ardoise. Cela ne semblait pas gêner la plupart des citoyens et autres aventuriers de passage. Pas même Ethänn qui marchait lentement vers l'auberge de renom.
L'eau glaciale s'infiltrait dans les moindres recoins de son armure et ses cheveux, collés sur son visage trempé. Ce dernier, avait une expression de profonde tristesse, mêlé d'une anxiété qu'il est rare de lui voir s'afficher. Il marchait, seul.

Il s'arrêta devant le gîte que l'on pourrait lui offrir moyennant quelques pièces. La douce chaleur de l'intérieur lui provenait avec tant de facilité que l'on aurait dit entrer dans un autre monde. Il apercevait des hommes et des femmes discutant, riant, un Elfe a l'entrée ôtait sa capuche, laissant apparaître ses longues oreilles qui se déplièrent d'un coup, projettant des milliers de goutelettes. Un Nain, déposa sa hache, le long du mur de bois verni, avant de se faire réprimander par la tenancière, et repartit vers une table de confrères en maugréant. Une serveuse s'approcha d'une tablée, avec sur son plateau, cinq chopes de bières, par la mousse qui s'en déversait. Ethänn remarqua également, assis au comptoir, deux jeunes femmes discutant, sans doute, de leur tenue vestimentaire quand quelqu'un tira sur la robe de l'une d'elles, qui se retourna et salua une Gnome. Elle se fit aider pour s'assoir et la discussion reprit.
Des discussions, il y en avait a revendre. Il y avait un tel brouhaha qu'il était vraiment difficile d'en discerner ne serait-ce qu'une seule. Ethänn s'apprêta a franchir le pas de la porte, qu'un homme le bouscula, en s'excusant, avant de passer devant lui et de rentrer. Cet homme ouvrit les bras a ses compagnons, puis les rejoins a leur tablée.

"Qu'est ce que je viens faire là...dit Ethänn tristement, je ne suis pas à ma place ici..."

Ethänn fit demi-tour. Il inspira doucement, regardant le ciel ombrageux. Il ferma les yeux, laissant la pluie s'écouler sur lui. Il voulait ne plus penser a rien, et laver ainsi le chagrin de cette abscence qui lui pèse au fond de son être. Lorsqu'il rouvrit les yeux, son regard se posa sur une boîte aux lettres sur sa droite. Son regard devint, aussitôt, beaucoup plus pénible a soutenir, car beaucoup plus triste qu'à son arrivée.

"Père...Petite soeur...Où êtes vous donc..."

Ethänn voulut crier mais sa peine, aussi grande soit-elle, le restreint à laisser échapper quoi que ce soit. Il serra les poings, l'espace d'un moment, puis se relâchèrent d'eux-mêmes. Les larmes et la pluie, ce soir-là, s'entremêlèrent. Le chagrin du Ciel et de cet homme semblait n'être qu'un.

Il se remit a marcher, toujours de ce pas élégant et sobre, mais son visage, lui, n'exprimait plus rien.

"Attention, ils arrivent !!!"

Voilà ce que criait perpétuellement les hommes que j'avais devant moi. Des hommes emplis de haine, de rage écumante, mais aussi de peur, de doute. Ces hommes qui se dressaient, armes a la main, aussi fièrement que possible, savaient pertinnement que leur heure approchait. Pourtant ils étaient là, sous cette pluie battante. Leur souffle, court et saccadé, laissait échapper un flot de condensation. Leurs mains, s'agrippaient fermement a leur épée, massue, ou autres boucliers. Le cliquetis de leur armure, se faisait de plus en plus inaudible. Un silence pesant. Voilà comment je l'ai ressenti. Un silence de mort tomba sur cette armée de fortune.

Un terrible hurlement me ramena a la réalité, j'eus juste le temps de me cacher sous mon bouclier qu'une terrible hache vint ripper dessus. Cet Orc massif qui se trouvait devant moi, ne cessait de me harceler. Je ne pus, comme seul riposte, que faire appel a la Lumière qui le frappa de plein fouet, l'obligeant a reculer momentanément. J'en profitai pour charger a mon tour. Ma lame virevolta et rippa contre son bouclier d'os et de bois. Un coup vers son flanc, un autre vers son visage. Le bougre était bon et savait se battre. Nous étions deux guerriers aguerris engagé dans une lutte a mort. Je ne voyais pas ce qui m'entourait, ma concentration était telle que je pouvais percevoir le moindre geste de mon opposant. L'eau perlait de mon heaume, emplissant ma bouche d'un goût âpre de sang mouillé. L'orc se mit a charger, bouclier en avant. Je voulus parer, mais quelque chose dans mon dos m'alerta.

Je me baissais prestemment, la hache de l'orc siffla a mes oreilles et s'enfonca profondément dans la chair d'un Troll, qui fut si surpris qu'il ne se douta pas de sa mort subite. L'Orc hurla, retirant sa hache avec fureur. Un sang noirâtre dégoulinant avec avidité le long de son manche. Il la brandit au dessus de ma tête. Mon bras s'allongea et ma lame s'enfonca loin dans le flanc de l'assaillant, qui redoublant d'effort, s'apprêtait a me découper.

Une flèche siffla et vint se ficher entre les yeux de l'Orc qui tomba en arrière de tout son poids. Mon regard se porta sur une Elfe, puissamment armé. Elle rabaissa son arc, me fit un signe de tête et courut vers le pont qui séparait l'Ecurie de la Scierie, où les combats faisaient rage depuis plusieurs heures. Je récupérai mon arme, mon regard se porta tout autour de moi. Je vis un magicien au prises avec des Réprouvés qui semblaient danser autour de lui tellement leur vitesse était incroyable.

Je me précipitai pour lui venir en aide:

"Ô Lumière, protège cet homme de la douleur ! Permets-lui d'être a l'abri de toute souffrances !"

Un halo lumineux vint entourer le mage, qui put s'enfuir vers nos alliés. Les Réprouvés voyant que leurs attaques étaient inefficaces se tournèrent vers moi. L'un se précipita sur moi, l'autre disparut de ma vue ce qui m'inquiéta grandement. Le premier Réprouvé m'envoyait de terribles estoques de ses deux lames empoisonnées, impossibilité de contre-attaquer. Je me retrouvais acculer derrière mon bouclier et mon épée, parant au mieux ces attaques meurtrières. Je ne sus vraiment combien de fois je fus toucher, tout ce que je sais, c'est qu'à un moment donné, j'ai ressenti une profonde douleur dans le bas du dos. Une souffrance si terrible que je réprimais un cri. Ma lame siffla en arrière, l'autre Réprouvé souriait a ma simple vue, et au sang sur sa lame. Je me positionnais au mieux entre les deux, reculant doucement pour pouvoir leur faire face. L'un deux voulut me toucher au visage mais sa lame ricocha sur mon casque, je pus le repousser de mon bouclier quand le deuxième riposta. Je le contrai de ma lame mais il m'envoya un terrible coup de pied derrière le genou qui me mit a terre. Il sauta sur moi, un pied sur mon bras tenant mon épée, un genou sur celui qui tenait mon bouclier. Il m'empoigna la gorge, me souriant largement, puis dans un parler que je ne comprenais pas scanda quelque chose avant d'amener sa lame entre mon armure et mon heaume, là où se trouvait ma gorge mise a nu.

"Par la Lumière !", scandais-je.

Un halo lumineux intense recouvrit le sol. Le Réprouvé hurla, se cachant momentanément les yeux. Je défis son étreinte, lui asséna un terrible coup de heaume qui le sonna, puis me relevant aussitôt, je fis face au second qui se jeta sur moi. D'un coup d'épée je réussis a parer son attaque, le destabilisant dans son élan. Mon bouclier s'éleva et vint le frapper derrière la nuque. Il s'écroula sur le sol, mon épée fendant son crâne en deux. Le deuxième était toujours au sol. Je m'approchais de lui, passa mes jambes sur ses flancs. Mon épée était le long de mon corps, prête a frapper et a mettre a mort...

La pluie n'avait pas cesser de tomber. Voulant sans doute effacer toutes traces de ce carnage horrible. Une pluie assourdissante, tentant vainement de cacher les cris, les entrechocs d'armes, les ralliements...Une pluie apaisante pour les brûlûres, et autres blessures en tout genre. Une pluie rafraîchissante qui gouttait sous toutes les coutures de mon armure pour apaiser cette furie meurtrière. Je me souviens de cette pluie. Mon visage se leva vers le ciel:

"Y'a t-il donc une raison pour tout ceci...? Faut-il donc tant de morts pour que la Paix survienne ?! Faut-il donc tant de haine, de souffrance pour que nos Peuples finissent par s'unir...Sommes-nous donc rien de plus que des instruments de guerre ?! Est-ce là ce que les préceptes de la Lumière m'ont appris...Toi, Lumière, qui est en chaque être, est-ce là ce que tu souhaites de nous ? Voir mourir ceux que tu chéris tant, même sous le couvert d'un quelconque acte de bonté..."

Ma main se ressera sur le pommeau de mon épée. Mon visage se tourna vers le Réprouvé, encore grogui. Mes yeux se fermèrent l'espace d'un instant. Lorsque je les rouvris, son crâne était fendu par le milieu. Mon épée fiché entre ses deux yeux. La pluie avait cesser...Mais mon coeur n'en finissait pas de pleurer.

J'ai perdu quelque chose ce soir-là...A jamais.

» Un jour bien triste
» [Goran] Voici une bien triste nouvelle... (décés)
» Triste jour que celui ci